mercredi 9 octobre 2024

Mise en œuvre du Kanban: gestion du temps de changement et problématique de la taille de lot avec 3 exemples



Mise en œuvre du Kanban dans une production à un produit puis dans une production à plusieurs produits : gestion du temps de changement et problématique de la taille de lot

La méthodologie Kanban est un système de gestion de la production développé dans le cadre de la production Toyota pour gérer les flux de matières premières et les processus de fabrication de manière plus efficace. L'objectif est de minimiser les stocks, d'optimiser les flux et de répondre aux demandes clients en temps réel. Cet article explorera deux scénarios différents de mise en œuvre du Kanban : une production mono-produit, puis une production multi-produits. Nous aborderons également les défis spécifiques, notamment le temps de changement d'outils et la problématique de la taille de lot.

1. Mise en œuvre du Kanban dans une production à un produit

Dans une production à un produit, le système Kanban est plus facile à mettre en place car la production est plus stable, avec peu ou pas de variabilité dans le flux de production. Le processus est relativement linéaire, ce qui permet une gestion plus fluide et une réponse rapide aux demandes des clients.

a. Flux de production simplifié

La chaîne de production pour un produit unique peut se diviser en plusieurs postes, chaque poste ayant son propre Kanban pour contrôler l'arrivée et le départ des pièces. Par exemple :

  • Un poste A produit une certaine quantité de pièces et les met dans un conteneur.
  • Lorsqu'un poste B a besoin de pièces pour continuer la production, il récupère un conteneur de pièces du poste A.

Ici, le Kanban agit comme un signal de production : lorsqu'un poste aval utilise des matières ou composants, il envoie un signal (souvent un carton ou une carte Kanban) au poste amont pour lui demander de produire davantage. Ce système empêche la surproduction et réduit les stocks excédentaires.

b. Avantages du Kanban dans une production à un produit

  • Réduction des stocks : La production est tirée par la demande réelle, ce qui permet de maintenir les stocks au niveau le plus bas possible.
  • Simplicité de gestion : Avec un seul produit, il n’y a pas de besoin de temps de changement d'outils ou de paramètres, ce qui facilite l'adaptation du système Kanban.
  • Réactivité accrue : Le système Kanban permet d'ajuster rapidement la production en fonction des variations de la demande.

c. Limites :

  • Capacité maximale figée : Dans une production à un produit, si la demande dépasse la capacité de production, il n’est pas toujours possible de répondre à cette hausse sans augmenter considérablement les ressources.

2. Mise en œuvre du Kanban dans une production à plusieurs produits




Lorsque la production passe à plusieurs produits, la gestion devient plus complexe, car il est nécessaire de jongler avec différents flux de production et de prendre en compte les temps de changement (setup) entre les différents produits.

a. Gestion des temps de changement

Dans une production multi-produits, chaque produit peut nécessiter des outillages spécifiques, des réglages différents, voire des temps de nettoyage ou de recalibration des machines. Ces opérations génèrent des temps de changement qui affectent la capacité de la ligne de production.

Le temps de changement est un paramètre critique, car plus ce temps est long, plus les périodes de non-production augmentent, ce qui ralentit l’ensemble de la chaîne. Pour pallier ce problème, il est essentiel de minimiser les temps de changement grâce à des méthodes comme le SMED (Single-Minute Exchange of Dies), une méthodologie qui vise à réduire les temps de changement à moins de 10 minutes. Cependant, même avec des temps de changement réduits, le Kanban doit être adapté pour optimiser les flux multi-produits.

b. Adaptation du système Kanban pour la production multi-produits

Dans ce cas, plusieurs types de Kanbans doivent coexister, chacun étant dédié à un produit spécifique. Chaque produit a son propre flux de matières premières et composants, ainsi que ses propres règles de gestion des stocks.

Un aspect critique est la synchronisation des différents flux de production. Les temps de changement, bien que minimisés, doivent être pris en compte dans la planification des séquences de production. La mise en place d’un Kanban électronique (E-Kanban) peut être particulièrement efficace dans ce contexte pour améliorer la gestion des flux complexes.

c. Problématique de la taille de lot

Dans une production multi-produits, la taille de lot est un paramètre clé à ajuster. De grands lots permettent de réduire la fréquence des changements de produits et donc d’optimiser le temps de production. Cependant, de grands lots augmentent également les niveaux de stocks en cours, ce qui va à l'encontre de la philosophie Kanban.

  • Grandes tailles de lots : Réduisent les temps de changement, mais augmentent les stocks et le risque d'obsolescence des produits.
  • Petites tailles de lots : Augmentent la flexibilité, mais entraînent une augmentation des temps de changement et une possible réduction de la productivité.

L’équilibre entre la taille de lot et les temps de changement est donc crucial. Il est souvent nécessaire d’analyser précisément les coûts associés aux changements de produits (temps de réglage, pertes de production) et les avantages d'une production en flux tiré (réduction des stocks, meilleure réponse à la demande).

d. Solutions pour la gestion optimale des lots

  • Réduire le temps de changement : Comme mentionné précédemment, l'approche SMED est l'une des solutions les plus efficaces pour réduire les temps de changement.
  • Produire en fonction de la demande : L'idéal est de définir la taille des lots en fonction de la demande réelle des clients, et non sur la base de capacités maximales théoriques ou de seuils de rentabilité obsolètes.
  • Flux mixte : Dans certains cas, il peut être judicieux de mélanger les produits sur une même ligne de production pour lisser les flux et éviter des temps de changement trop fréquents.

3. Conclusion

La mise en œuvre du système Kanban dans une production à un produit est relativement simple et permet une optimisation immédiate des stocks et de la réactivité. Cependant, lorsque l'on passe à une production multi-produits, la gestion devient beaucoup plus complexe. Les temps de changement entre les produits et la gestion de la taille des lots deviennent des défis majeurs à résoudre.

Pour surmonter ces obstacles, il est crucial de minimiser les temps de changement grâce à des méthodes comme le SMED et de trouver le juste équilibre entre la taille des lots et la flexibilité de la production. Un système Kanban bien conçu dans un environnement multi-produits peut néanmoins permettre de maintenir des niveaux de stocks bas tout en répondant rapidement et efficacement aux demandes des clients.

L’a

Exemple 1 : Production Mono-produit

Contexte

  • Une usine produit uniquement des vis.
  • La demande moyenne est de 1000 vis par jour.
  • L'usine a une capacité de production de 200 vis par heure avec une équipe de jour de 8 heures.
  • Le réapprovisionnement des matières premières (métal) prend 1 jour.

Calculs pour le système Kanban

Le but ici est d’utiliser le système Kanban pour éviter les ruptures de stock et ajuster la production en fonction de la demande.

a) Nombre de cartes Kanban pour gérer la production des vis
  1. Demande quotidienne : 1000 vis/jour
  2. Taille du lot (quantité produite par cycle ou série de production) : On fixe par exemple une taille de lot de 200 vis (ce qui correspond à une heure de production).
  3. Délai de réapprovisionnement : Le délai de réapprovisionnement est de 1 jour.

La formule pour calculer le nombre de cartes Kanban dans ce cas est la suivante :

Nombre de cartes=Demande quotidienne×Deˊlai de reˊapprovisionnementTaille de lotNombre\ de\ cartes = \frac{Demande\ quotidienne \times Délai\ de\ réapprovisionnement}{Taille\ de\ lot}

En remplaçant les valeurs :

Nombre de cartes=1000×1200=5 cartesNombre\ de\ cartes = \frac{1000 \times 1}{200} = 5\ cartes

Cela signifie que l'usine doit avoir 5 cartes Kanban pour la production des vis, chacune représentant un lot de 200 vis. À chaque fois qu’une carte est retirée, cela signifie que 200 vis ont été produites, et on peut réapprovisionner en matières premières si nécessaire.

b) Stock de sécurité

Pour éviter les ruptures imprévues, on ajoute un stock de sécurité. Si on suppose un stock de sécurité correspondant à 20% de la demande quotidienne :

Stock de seˊcuriteˊ=0,2×1000=200 visStock\ de\ sécurité = 0,2 \times 1000 = 200\ vis

Ainsi, le stock minimal à conserver est de 200 vis, et ces vis sont prises en compte lors de la gestion des cartes Kanban pour déclencher le réapprovisionnement.. L'adaptation continue du Kanban aux spécificités de la production multi-produits est essentielle pour garantir sa réussite à long terme.

Exemple 2 : Production Multi-produit

Contexte

  • Une usine produit deux types de pièces : roues et roulements.
  • La demande quotidienne est de 500 roues et de 300 roulements.
  • La capacité de production est de 100 roues par heure et de 75 roulements par heure.
  • Le délai de réapprovisionnement des matières premières est de 2 jours.

Calculs pour le système Kanban

a) Nombre de cartes Kanban pour les roues
  1. Demande quotidienne : 500 roues/jour
  2. Taille du lot : On fixe un lot de 100 roues (production par heure).
  3. Délai de réapprovisionnement : 2 jours

On applique la même formule que précédemment :

Nombre de cartes=Demande quotidienne×Deˊlai de reˊapprovisionnementTaille de lotNombre\ de\ cartes = \frac{Demande\ quotidienne \times Délai\ de\ réapprovisionnement}{Taille\ de\ lot}

Pour les roues :

Nombre de cartes=500×2100=10 cartesNombre\ de\ cartes = \frac{500 \times 2}{100} = 10\ cartes

b) Nombre de cartes Kanban pour les roulements
  1. Demande quotidienne : 300 roulements/jour
  2. Taille du lot : Un lot de 75 roulements.
  3. Délai de réapprovisionnement : 2 jours

Pour les roulements :

Nombre de cartes=300×275=8 cartesNombre\ de\ cartes = \frac{300 \times 2}{75} = 8\ cartes

c) Stock de sécurité pour les deux produits
  • Pour les roues, on suppose un stock de sécurité de 15% de la demande quotidienne :

Stock de seˊcuriteˊ(roues)=0,15×500=75 rouesStock\ de\ sécurité (roues) = 0,15 \times 500 = 75\ roues

  • Pour les roulements, on suppose également un stock de sécurité de 15% de la demande quotidienne :

Stock de seˊcuriteˊ(roulements)=0,15×300=45 roulementsStock\ de\ sécurité (roulements) = 0,15 \times 300 = 45\ roulements


Résumé des résultats

  • Production Monoproduit (vis) : 5 cartes Kanban pour gérer la production, avec un stock de sécurité de 200 vis.
  • Production Multiproduit :
    • Roues : 10 cartes Kanban et un stock de sécurité de 75 roues.
    • Roulements : 8 cartes Kanban et un stock de sécurité de 45 roulements.

Dans chaque cas, le système Kanban permet de gérer le flux de production de manière optimisée, en s'assurant que les stocks ne tombent pas à un niveau critique tout en minimisant les surplus.


Exemple 3: Une ligne de production unique qui fabrique trois produits différents avec un temps de setup (changement de configuration) entre chaque produit et des tailles de lots différentes à optimiser.

Contexte

  • Une usine fabrique trois produits : Produit A, Produit B, et Produit C.
  • La production se fait sur une seule ligne, ce qui implique qu'il y a un temps de setup à chaque changement de produit.
  • Objectif : Optimiser la taille des lots pour minimiser les coûts de setup tout en évitant les ruptures de stock.

Données :

  1. Produit A :
    • Demande quotidienne : 300 unités/jour
    • Temps de production : 1 minute/unité
    • Temps de setup : 30 minutes
  2. Produit B :
    • Demande quotidienne : 200 unités/jour
    • Temps de production : 2 minutes/unité
    • Temps de setup : 45 minutes
  3. Produit C :
    • Demande quotidienne : 100 unités/jour
    • Temps de production : 1.5 minutes/unité
    • Temps de setup : 60 minutes

Objectif : Optimiser les tailles de lot pour chaque produit afin de minimiser le temps de setup par jour tout en assurant que la production couvre la demande quotidienne.

Étapes pour l’optimisation des lots

1. Calcul des besoins en production pour chaque produit

  • Produit A : 300 unités x 1 min/unité = 300 minutes de production par jour
  • Produit B : 200 unités x 2 min/unité = 400 minutes de production par jour
  • Produit C : 100 unités x 1.5 min/unité = 150 minutes de production par jour

2. Total de production sans setup

Le temps total de production par jour, sans tenir compte des setups, est :

300 (ProduitA)+400 (ProduitB)+150 (ProduitC)=850 minutes300\ (Produit A) + 400\ (Produit B) + 150\ (Produit C) = 850\ minutes

Sachant qu’une journée de production est typiquement de 8 heures, soit 480 minutes, il n’est pas possible de produire chaque produit quotidiennement sans interruption. Il faut donc définir des tailles de lots optimales pour diminuer la fréquence des changements (setup).

3. Calcul du temps de setup total

Le temps de setup dépend du nombre de fois où la ligne change de produit. Si l’on change de produit tous les jours :

  • Produit A : 30 minutes de setup
  • Produit B : 45 minutes de setup
  • Produit C : 60 minutes de setup

Total de setup quotidien pour chaque produit produit chaque jour :

30 (A)+45 (B)+60 (C)=135 minutes30\ (A) + 45\ (B) + 60\ (C) = 135\ minutes

Ce total est trop élevé pour une journée de 480 minutes. Il faut donc augmenter les tailles de lots afin de réduire le nombre de setups par jour.

4. Optimisation des tailles de lots

L’idée ici est de produire des lots plus grands, couvrant plusieurs jours de demande, afin de minimiser le nombre de setups.

a) Taille de lot pour le Produit A

Si on choisit un lot couvrant 3 jours de demande pour le Produit A :

  • Demande pour 3 jours : 300 x 3 = 900 unités
  • Temps de production pour 900 unités : 900 x 1 min = 900 minutes
  • Le lot sera produit en 1.875 jours (900 minutes / 480 minutes par jour).
  • Setup : 30 minutes pour un cycle de 3 jours, soit 10 minutes de setup par jour en moyenne.
b) Taille de lot pour le Produit B

Si on choisit un lot couvrant 2 jours de demande pour le Produit B :

  • Demande pour 2 jours : 200 x 2 = 400 unités
  • Temps de production pour 400 unités : 400 x 2 min = 800 minutes
  • Le lot sera produit en 1.67 jours.
  • Setup : 45 minutes tous les 2 jours, soit 22.5 minutes de setup par jour en moyenne.
c) Taille de lot pour le Produit C

Si on choisit un lot couvrant 5 jours de demande pour le Produit C :

  • Demande pour 5 jours : 100 x 5 = 500 unités
  • Temps de production pour 500 unités : 500 x 1.5 min = 750 minutes
  • Le lot sera produit en 1.56 jours.
  • Setup : 60 minutes tous les 5 jours, soit 12 minutes de setup par jour en moyenne.

5. Total du temps de production optimisé

En optimisant les tailles de lots, on a :

  • Produit A : 900 minutes de production tous les 3 jours (1.875 jours de production), 10 minutes de setup en moyenne par jour.
  • Produit B : 800 minutes de production tous les 2 jours (1.67 jours de production), 22.5 minutes de setup en moyenne par jour.
  • Produit C : 750 minutes de production tous les 5 jours (1.56 jours de production), 12 minutes de setup en moyenne par jour.
Temps total par jour :
  • Temps de production quotidien moyen :

    • Produit A : 9003=300 minutes\frac{900}{3} = 300\ minutes
    • Produit B : 8002=400 minutes\frac{800}{2} = 400\ minutes
    • Produit C : 7505=150 minutes\frac{750}{5} = 150\ minutes

    Total : 850 minutes / 3 jours → 283 minutes/jour en moyenne.

  • Temps de setup moyen par jour :

    • Produit A : 10 minutes
    • Produit B : 22.5 minutes
    • Produit C : 12 minutes

    Total : 44.5 minutes par jour.

Conclusion exemple 3:

Avec cette optimisation, le temps de production quotidien est de 283 minutes et le temps de setup est réduit à 44.5 minutes par jour en moyenne. Cela laisse environ 152.5 minutes pour d’autres tâches (maintenance, pauses, etc.) sur une journée de 480 minutes, tout en couvrant les besoins de production sur plusieurs jours avec moins de changements de configuration.

L’optimisation des tailles de lots permet ainsi de réduire la fréquence des setups et d’augmenter l’efficacité globale de la production.

lundi 7 octobre 2024

Planification et Ordonnancement : Une Gestion Optimisée de la Production

 


Planification et Ordonnancement : Une Gestion Optimisée de la Production

La planification et l'ordonnancement sont des concepts clés dans la gestion de la production industrielle, permettant aux entreprises d’organiser de manière optimale l’utilisation des ressources pour produire des biens ou des services. Ces processus visent à synchroniser la demande avec la capacité de production tout en minimisant les coûts et en optimisant les délais. La différence entre ces deux notions est subtile mais importante : la planification concerne la définition des objectifs à long terme et des stratégies à suivre, tandis que l'ordonnancement se concentre sur l'exécution et la coordination des tâches à court terme.

1. Définition de la Planification

La planification de la production est le processus stratégique par lequel une entreprise décide quoi produire, quand le produire et en quelles quantités. Elle repose sur l’analyse des demandes futures, des capacités de production, et des contraintes internes (machines, main-d’œuvre, stock, etc.) et externes (fournisseurs, délais, etc.).

Objectifs de la planification :

  • Maximiser l'efficacité : Organiser les ressources pour réduire les temps morts, éviter les surcharges de travail et les goulots d’étranglement.
  • Optimiser l’utilisation des ressources : Assurer une bonne utilisation des machines, des matières premières et de la main-d’œuvre.
  • Répondre à la demande : Garantir que les produits soient prêts à temps pour répondre aux commandes des clients.
  • Réduire les coûts : Minimiser les coûts de production, notamment ceux liés au stockage, à la main-d’œuvre et à l’énergie.

La planification peut se décliner en plusieurs niveaux, chacun correspondant à un horizon temporel différent :

1.1. Planification à long terme (stratégique)

Cette phase concerne les décisions à plusieurs années, voire plusieurs décennies. Elle implique des choix structurants comme les investissements dans de nouvelles machines, l'implantation d'une nouvelle ligne de production ou l’ouverture d'une nouvelle usine. Ces décisions ont des impacts durables sur la compétitivité et la capacité de production de l’entreprise.

1.2. Planification à moyen terme (tactique)

À moyen terme (typiquement sur une période de 6 mois à 3 ans), la planification se concentre sur la gestion des stocks, les prévisions de la demande et les ajustements de capacité. Elle inclut des aspects comme le plan directeur de production (PDP), qui détermine combien de produits doivent être fabriqués et à quelles échéances.

1.3. Planification à court terme (opérationnelle)

À court terme, la planification prend la forme d’un plan de production détaillé, où l’entreprise détermine avec précision les quantités de produits à fabriquer, les ressources nécessaires et les délais à respecter pour les semaines ou mois à venir. C’est ici qu’intervient l’ordonnancement, qui constitue une extension plus précise de cette planification.

2. Ordonnancement : L'Exécution des Plans de Production

L’ordonnancement est la phase opérationnelle qui suit la planification. Il consiste à organiser dans le temps l'exécution des différentes tâches nécessaires à la production. L’objectif est de déterminer l'ordre précis dans lequel les activités doivent être réalisées, ainsi que les ressources à allouer (machines, opérateurs, outils, etc.).

2.1. Objectifs de l'ordonnancement :

  • Optimisation des délais de production : Minimiser le temps de passage d’une commande en usine (lead time) pour respecter les délais de livraison.
  • Réduction des coûts : Limiter les coûts associés à l’inactivité des machines, aux changements de série (set-up) et aux stocks intermédiaires.
  • Maximisation de la productivité : S’assurer que toutes les ressources disponibles (machines, main-d’œuvre) soient utilisées efficacement et sans interruption.
  • Réduction des temps d'attente : Éviter les goulets d’étranglement en répartissant les tâches de manière équilibrée entre les différentes ressources.

2.2. Méthodes d'ordonnancement

L’ordonnancement peut s'effectuer selon plusieurs méthodes, selon la nature du processus de production et les objectifs prioritaires de l'entreprise.

a) Méthode par priorité

Cette approche consiste à classer les commandes ou les opérations par ordre de priorité, en fonction de critères comme la date de livraison, l’importance du client ou l’urgence de la commande.

b) Méthode FIFO (First In, First Out)

Dans cette méthode, les premières commandes arrivées sont traitées en premier. Elle est simple à mettre en œuvre mais ne prend pas en compte les contraintes de capacité ou d'optimisation des temps.

c) Méthode par charge équilibrée

Cette technique vise à répartir de manière équitable la charge de travail entre toutes les machines et opérateurs, afin de maximiser l’utilisation des ressources disponibles et minimiser les temps d’attente.

d) Méthode des goulots d'étranglement

L’ordonnancement est centré sur les ressources critiques ou les étapes du processus qui constituent des goulets d'étranglement (par exemple, des machines limitées en capacité). Il s'agit de minimiser le temps d'attente à ces points clés.

e) Approche heuristique (Règles empiriques)

Les entreprises peuvent aussi utiliser des règles heuristiques basées sur des expériences passées, qui incluent des critères comme la durée des opérations, les coûts ou la flexibilité des machines.

2.3. Outils et logiciels d'ordonnancement

Avec la complexité croissante des processus industriels modernes, l’ordonnancement devient de plus en plus assisté par des systèmes informatiques. Les logiciels APS (Advanced Planning and Scheduling) sont utilisés pour modéliser les contraintes et optimiser les plannings de production en temps réel. Ils peuvent prendre en compte des milliers de paramètres (machines disponibles, main-d’œuvre, dates limites, etc.) et générer un planning optimisé.

Ces logiciels offrent plusieurs avantages :

  • Adaptabilité en temps réel : Ajustement du planning en fonction des changements de conditions (pannes de machines, retards de livraison).
  • Optimisation des ressources : Allocation optimale des ressources en fonction des priorités.
  • Visibilité accrue : Meilleure transparence pour les gestionnaires qui peuvent suivre les opérations en temps réel.

3. Les défis liés à la planification et à l’ordonnancement

Malgré les outils sophistiqués disponibles, la planification et l’ordonnancement demeurent des tâches complexes. Voici quelques-uns des défis les plus courants :

3.1. Incertitude de la demande

Les prévisions de la demande ne sont jamais parfaitement exactes. Une erreur dans les estimations peut entraîner soit une surproduction (et donc un excédent de stock), soit une sous-production (et des retards de livraison). Cela complique la tâche des planificateurs qui doivent ajuster les niveaux de production en conséquence.

3.2. Contraintes de capacité

Les ressources de production (machines, main-d’œuvre) sont souvent limitées, et la surutilisation peut entraîner des pannes ou une diminution de la productivité. La gestion des goulots d’étranglement est un enjeu central de l’ordonnancement.

3.3. Coordination entre les différents services

La planification de la production doit tenir compte de plusieurs services (approvisionnement, production, maintenance, logistique, etc.). Une mauvaise coordination peut entraîner des ruptures dans le processus, des retards ou des erreurs de production.

3.4. Changements imprévus

Les aléas de production (pannes de machines, absences du personnel, retards des fournisseurs) imposent souvent des révisions du planning initial. Cela nécessite une grande flexibilité dans la gestion des ressources.

4. Conclusion

La planification et l'ordonnancement sont essentiels pour assurer une production fluide, optimisée et rentable dans toute organisation industrielle. Alors que la planification se concentre sur les stratégies globales et l’anticipation des besoins futurs, l’ordonnancement vise à organiser concrètement l'exécution des tâches en temps réel. Le succès de ces processus repose sur une bonne coordination, une anticipation des contraintes, et l’utilisation d’outils performants pour ajuster constamment la production en fonction des évolutions.